Sur Facebook, on écrit sur un mur, son mur. Endossant le rôle de directeur de la publication, on y poste un contenu (produit ou relayé).
Sur Facebook, on écrit sur un mur, son mur. Endossant le rôle de directeur de la publication, on y poste un contenu (produit ou relayé).
À la différence des murs physiques, qui n’ont le plus souvent que des oreilles, le mur de Facebook a la particularité de posséder également une bouche et une langue. Le mur non seulement entend, mais parle et répond. Capable de pensées et d’émotions, il réagit.
Écho de multiples voix, mon mur est hanté par l’Autre. Cette constatation, certes vertigineuse, n’est cependant rien comparée à la prise de conscience que l’on est soi-même altération, rumeur, écho, fissure désirante dans le mur de l’autre.
Parodiant l’énigmatique phrase de Lacan, « un signifiant, c’est ce qui représente le sujet pour un autre signifiant », nous pourrions proposer l’axiome facebookien suivant :
« Un mur représente un sujet pour un autre mur ».
Mais, mauvaise langue, nous préférons lancer une hypothèse plus en phase avec la nature autartistique de l’homme numériquement augmenté (autarcique, autistique et artiste) :
« Un sujet représente un mur pour un autre sujet ».
Au-delà de ces amusants jeux de langage, quelques questions centrales persistent :
- Peut-on faire le mur ?
- Quelle est la nature de ce mur ?
- Est-il enveloppe, bulle, membrane, lien, séparation, peau, interface… ?
Certes, si les murs peuvent avoir des oreilles, les oreilles peuvent également avoir des murs. Le mur de Facebook est un mur murmurant. Il a des amours, des indifférences, des rejets, des adhésions, des indignations… Mais qu’y a-t-il derrière tout cela ?
Derrière le mur Facebook, il y a un ordinateur,
Derrière l’ordinateur, il y a un système d’exploitation,
Derrière le système d’exploitation, il y a des applications ou logiciels ou programmes,
Derrière le programme, il y a du code,
Derrière le code, il y a des chiffres…
Autant d’interfaces entre nous et la MATIÈRE CALCULÉE.
Derrière l’Inter-face donc, une Face, un Visage en quête de miroir…, à l’infini.
Si « Autrui est visage » (Levinas) et que « le visage parle » (Levinas), force est de constater qu’il est difficile d’entrer en relation avec la Face du Grand Livre du Web. L’inter-face empêche la translation subjective des visages, translation sans laquelle il n’est de véritable communication (au sens bataillien du terme). Le transport anté-prédicatif dans le sans face-à-face est imperturbablement contrarié par l’interface et ses effets de miroirs.